Le redoublement, ce n’est pas si mal que cela !

Illustration de Flavien Rohr

Une année non validée, cela est une des craintes de beaucoup d’étudiants. Lorsque c’est le cas, la question du redoublement se pose alors. En vaut-il l’effort ?

Certains ont déjà vécu cette expérience, pas forcément agréable, où nous nous retrouvons à fondre sur place après avoir appris que nous n’avions pas validé notre année, que ce soit dans les études primaires, secondaires ou supérieures (un sentiment qui est très souvent lié à une pression familiale). La période où l’on doit faire face à nos proches (ou pas), qui en attendaient un retour positif, est un passage émotionnellement difficile pour beaucoup, mais il faut noter qu’elle peut tout aussi être neutre voire positive. Mais, déclaration à faire ou pas, le plus lourd à vivre n’est pas le regard des autres : c’est principalement l’image que nous nous faisons de nous-même après que nous ayons appris la nouvelle et potentiellement fait face à la déception des proches.

Enchantée ! Je suis Fanny, et je viens vous partager mon vécu sur le redoublement, parce qu’il y a pas mal de personnes qui y passent et nous n’osons pas toujours en parler. Pour information, je redouble ma première année de Licence SVT. A bien noter que mes arguments se basent donc sur mon expérience personnelle, et que chaque personne a vécu, vit actuellement ou vivra cela d’une différente manière, en fonction des situations et des personnalités.

Partons du commencement. Le passage du lycée au supérieur est un changement radical en termes de rythme de travail. Nous ne sommes plus du tout cadrés et surveillés, nous n’avons plus le même contact avec les professeurs, et n’oublions pas que nous arrivons dans un nouvel établissement et que nous ne connaissons pas forcément grand monde. Ce changement demande un temps d’adaptation et la durée de celui-ci dépend de chaque personne. En plus de cette difficulté, nous avions dû subir, entre 2020 et 2021, les confinements, ce qui a évidemment conduit à une perturbation de cette période d’adaptation. Certains et certaines ont réussi à s’en sortir, d’autres non. J’ai personnellement fait partie de la deuxième catégorie.

L’année avait plus ou moins normalement commencé : tous les cours étaient en présentiel, on a pu voir la tête de certains de nos professeurs, rencontrer quelques nouvelles personnes et découvrir un petit peu le campus. Mais cela a rapidement été brouillé d’abord par une phase en comodal (du présentiel une semaine sur deux) puis par un passage complet en distanciel. A noter que j’avais déjà mal vécu le distanciel pour la fin d’année de terminale, ce qui a dû être le cas pour d’autres aussi. Rajoutez à cela une pincette d’ambiance pas réellement compatible avec le suivi des cours à la maison, une confiance en soi qui n’est initialement pas très stable, des problèmes techniques récurrents ainsi que des mails se contredisant à longueur de mois, et cela vous donne un décrochement total deux mois seulement après la rentrée (bien évidemment et encore une fois, à chacun ses facteurs et sa situation). En résumé, l’année partait d’un bon pied. La fatigue physique, mais surtout mentale (et nous pourrions même dire d’origine mentale), s’est très rapidement fait ressentir. Finalement, par manque de travail, les résultats n’ont pas été suffisants pour valider l’année. Et là, c’est le drame

En épargnant le côté scandale familial en disant simplement qu’il y a dysfonctionnement de l’épiglotte faisant alors passer la nouvelle dans le mauvais conduit (alias avaler de travers), je vous annonce, sans surprise, que les vacances d’été suivantes ne sont pas si reposantes. Mais, elles représentent tout de même l’occasion de se remettre en question par rapport à l’année qui vient de se passer. Est-ce qu’on envisagerait une poursuite d’études, donc une réorientation ou un redoublement, ou est-ce qu’on sort du système d’études et on intègre le marché du travail ? C’est la question principale, mais elle est immanquablement accompagnée par d’autres, notamment celles liées au regard d’autrui et à l’estime de soi. Par expérience personnelle, je juge cette période comme étant la plus compliquée à vivre.

Le début de cette phase peut être comparé à un cercle vicieux : entre la déception personnelle de ne pas avoir validé l’année, entre la déception des proches qui avaient des attentes, entre les paroles lâchées et les pensées omniprésentes, tout cela aboutissant à une mise en doute de nos capacités, à une baisse de confiance en soi et donc d’estime de soi ce qui se ramène à la déception, cela peut être compliqué de trouver une réponse, une sortie… Avec du recul, je m’autorise à écrire cela : on a beau nous dire qu’il est important d’être bien entouré et d’essayer de rester optimiste, rien d’autre ne permettra de sortir avec succès de ce cercle vicieux que d’avoir sa propre illumination sur la situation. Je peux affirmer cela, parce que c’est à ce moment-là où les cartes ont commencé à se retourner sur la table, voire que de nouvelles cartes sont apparues. C’est le début d’une prise en charge personnelle de sa personne, et peut-être même d’une reconstruction de soi par le biais d’une prise en main de la situation par et pour soi. Nous sommes conscients à ce moment-là que le choix que nous allons faire sera gravé comme étant le nôtre et pour une raison qui nous est propre. Cela devient notre première force face au cercle vicieux et donc également aux personnes qui sont encore occupées à nous déblatérer leur déception. Les volontés se dessinent, la motivation suit le mouvement, et un choix est fait. Le mien a été le redoublement. 

Nous ne nous étalerons pas sur le côté psychologique et tout le processus qu’il peut y avoir pour atteindre de nouveau un stade émotionnel stable, nous laissons ce domaine aux professionnels de santé. J’en profite pour rappeler qu’il ne faut pas hésiter à se tourner vers eux, quel que soit le souci, et peu importe son degré d’importance : s’il vous gêne dans votre quotidien, c’est une raison suffisante pour leur en parler. En tant qu’étudiants, nous avons la chance d’avoir des professionnels de santé à notre disposition, gratuitement. 


La nouvelle année commence. Désormais, nous ne nous lançons pas sur un terrain inconnu et nous avons donc un pas d’avance sur les nouveaux. Nous nous sommes déjà familiarisés avec l’administration universitaire, il n’y a donc pas de réelle prise de tête avec la paperasse, ce qui exclut une source de stress. Nous avons déjà nos quelques marques sur le campus et nous avons un début de réflexion sur notre nouvelle façon d’étudier. Durant les premiers jours, le plus dur n’est pas l’adaptation, mais reprendre le rythme des cours. En addition à tout cela, le fait d’être de nouveau étudiant ou étudiante dans la même université nous aide à nous remotiver puisqu’elle nous est familière. Nous nous mettons petit à petit au travail, plus rapidement que les autres qui doivent encore s’habituer à la vie universitaire.

Certains et certaines peuvent se dire qu’ils perdent une année en redoublant. Avec un grand sourire, je peux vous assurer que cela n’est pas du tout la réalité ! En effet, si l’année précédente n’a pas été victorieuse, en retentant une deuxième fois, nous nous autorisons à travailler sur nous-même de manière plus poussée que pendant les vacances, notamment sur les faiblesses qui ont fait que l’année précédente ne fut pas validée. C’est l’occasion de s’armer d’une méthode de travail et d’un plan de parcours d’études réfléchis. Nous acquérons un tout autre point de vue sur les études lors de l’année de redoublement. Tout cela présente de quoi se reconstruire une confiance en soi de fer.

A côté de cela, en fonction du nombre de matières qui sont à rattraper, il y a possibilité de demander un stage si le second semestre est libre, de trouver un contrat étudiant, de commencer à aller à la salle ou de s’inscrire à une association comme le CQFD, l’AELBO ou l’Association Sportive de Lyon 1 afin de participer aux compétitions, de participer à des conférences sur les sujets liés au domaine d’étude qui nous intéressent, … Cette année de redoublement, si elle n’est pas aussi chargée que l’année précédente, nous permet évidemment de nous recentrer sur nos intérêts et nos priorités. Très souvent, lorsque je demande aux redoublants leur avis sur cette année particulière, ils me répondent tous la même chose : ils sont contents d’avoir redoublés. 

Le redoublement n’est donc pas une expérience négative, tout le contraire ! C’est une année d’enrichissement. Et peu importe ce que peuvent dire les personnes externes à nos études, le plus important sont nos objectifs et nos volontés. Donc si nous voulons retenter notre chance parce que c’est ce cursus qui nous plaît et sur lequel nous voulons travailler plus tard, pourquoi fermer la porte au redoublement ?